Tu Es À Moi

Tu Es À Moi
Victory Storm
Quand Kendra prit la décision d'approcher Aleksej par la ruse, elle était consciente des risques qu'elle prenait car cet homme était sans pitié et ne pardonnait jamais, et par ailleurs suffisamment puissant pour lui faire chèrement payer toute erreur de sa part. Un seul faux pas et elle perdait la possibilité d'obtenir les informations qu'elle recherchait. Plusieurs mois se sont écoulés depuis leur première rencontre lorsqu'à l'improviste tout bascule à la suite d'une trahison qui met la vie de Kendra en danger et révèle tous ses mensonges. Le moment du règlement de compte est arrivé et Aleksej est prêt à la détruire. Mais, au moment où il la tient entre ses mains, il découvre qu'elle a oublié son passé, un passé qui cache des secrets qu'il a besoin de connaître. Il va devoir choisir entre sa vengeance ou garder cette femme dangereuse à ses côtés, serrée entre ses spires, jusqu'au jour où elle recouvrera la mémoire.

Victory Storm
Tu es à moi

Victory Storm

TU ES À MOI

Traduit par Jean-Luc Dollat

Copyright © 2020 – Jean-Luc Dollat

TU ES À MOI
VICTORY STORM

Copyright ©2020 VictoryStorm
Editeur: Tektime
Traducteur (ita –> fr): Jean-Luc Dollat

Cover: “Good looking guy” di Andrey Kiselev – https://stock.adobe.com | Projet graphique de Victory Storm

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Tu es à moi
Quand Kendra prit la décision d`approcher Aleksej par la ruse,elle était consciente des risques qu`elle prenait car cet hommeétait sans pitié et ne pardonnait jamais, et par ailleurssuffisamment puissant pour lui faire chèrement payer toute erreurde sa part. Un seul faux pas et elle perdait la possibilitéd`obtenir les informations qu`elle recherchait.
Plusieurs mois se sont écoulés depuis leur première rencontrelorsqu`à l`improviste tout bascule à la suite d`une trahison quimet la vie de Kendra en danger et révèle tous ses mensonges.
Le moment du règlement de compte est arrivé et Aleksej est prêtà la détruire. Mais, au moment où il la tient entre ses mains, ildécouvre qu`elle a oublié son passé, un passé qui cache des secretsqu`il a besoin de connaître.
Il va devoir choisir entre sa vengeance ou garder cette femmedangereuse à ses côtés, serrée entre ses spires, jusqu`au jour oùelle recouvrera la mémoire.

1

KENDRA
"Danielle, viens ici", m'intima Aleksej de ses manièresautoritaires et précipitées qui me tapaient beaucoup sur lesnerfs.
J’aurais voulu lui répondre que "Non", que je n'aurais pas faitce qu'il voulait, mais ces paroles étaient interdites si je voulaisdemeurer dans son entourage.
Je dégainai donc mon meilleur sourire et m'approchailangoureusement. Chaque pas était accompli avec une lenteurcalculée tout en le défiant du regard, consciente toutefois quecette attitude pouvait détériorer sa patience somme toute assezlimitée.
Au lieu de rester debout devant lui comme il s'y attendait, jem'appuyai nonchalamment sur son bureau d'acajou et promenai mesmains sur la pile de documents posée derrière moi.
Je savais que je l'irritais par mon arrogance et cela m'amusait.Je jouissais de ces brefs instants de suffisance, pleinementconsciente des risques encourus. Mais je n'y prenais garde etj'étais sûre qu'il était plus facile d'obtenir sa confiance par despetits mouvements de rébellion que par une attitude de soumissiondocile.
"Assieds-toi sur mes genoux", s'écria-t-il avec irritation.
J'obéis, retenant un soupir de mécontentement.
À l'instant même, ses mains se posèrent sur mon corps et seslèvres sur mon cou.
Je détestais sa bouche, surtout depuis la découverte du plaisirqu'elle me procurait, si bien que j’avais commencé à prendrepeur.
Peur d'éprouver des sensations erronées qui me troublaient etm'envoûtaient à la fois.
J'aurais voulu fuir, mais cela m’était impossible.
Lorsque j'avais pris la décision d'approcher cet homme, j'étaisconsciente que je devrais m'abaisser à son niveau, avecl’éventualité de commettre un faux pas.
J’avais accepté ce risque.
J'aurais tout fait pour parvenir jusqu’à lui et à ce quigravitait autour de lui, comme ces diamants répandus dans une boîtede velours bleu ouverte sur son bureau.
"Ils te plaisent, ces diamants ?", me demanda-t-il à un certainpoint, s’écartant de moi.
"Pourquoi me le demandes-tu ?", cette insinuation me préoccupa,tandis que je sentais ses mains remonter sous ma jupe jusqu'àl'élastique du string.
"J'ai noté que tu les observais depuis que tu es entrée danscette pièce. Ils ont l’air de beaucoup t'intéresser", poursuivit-ilsans broncher, malgré la morsure que j'infligeai à son poignet pourtenter de l'éloigner.
"C'est un fait : toutes les femmes veulent être couvertes debijoux", lui répondis-je, feignant l'indifférence malgré le sursautprovoqué par la déchirure de la dentelle qui couvrait mes partiesintimes, me laissant une marque sur la peau.
Il en allait toujours ainsi avec Aleksej : il semblait concentrésur ce qu'il disait, mettant son interlocuteur sur la défensive ;mais il était trop tard lorsqu'on s'apercevait qu'il avait déjàpassé outre.
"Toi aussi ?" me chuchota-t-il dans l'oreille, embrassant moncou et glissant sa main entre mes cuisses serrées.
J'étais si mal à l'aise que je ne comprenais plus s’il étaitquestion de diamants ou d'autre chose.
Je parvins à répondre : "Certainement", avant d'être saisie parsa bouche qui prit violemment possession de mes lèvres.
"Comment se fait-il que je ne t'aie jamais vue porter unquelconque bijou ?", poursuivit-il avec la froideur habituelle dontil ne se départait jamais, raison pour laquelle je le haïssais.
"Que veux-tu que je te dise ? Nul homme n'a jamais daigné m'enoffrir", répondis-je avec aigreur, approchant ma main de la boîtede velours bleu sombre. Mais avant que je puisse atteindre lesdiamants, Aleksej, saisissant mon poignet, me tourna vers lui.
“Ils ne sont pas pour toi”, m’avertit-il, me fulminantfroidement du regard.
“Alors pour qui sont-ils ?”, demandai-je, piquée par lacuriosité.
Il coupa court : "Cela ne te regarde pas", et, me saisissant parles hanches, il m’inclina sur le bureau.
"Tu t’en tapes une d'autre ?", grommelai-je, m'efforçant de melibérer. Jamais je n'aurais permis à quiconque d'être un obstaclepour parvenir à mes fins !
Il éclata de rire : "Jalouse ?"
"Je ne suis pas partageuse, tu devrais le savoir."
"Nous n'avons baisé qu'une seule fois et tu prétends déjà êtrela seule et l'unique ?"
J’évitai de répondre combien il m’avait coûté de m’êtrevolontairement donnée à lui, ceci sans prendre en compte lesmarques des cordes avec lesquelles il m’avait attachée, ni le tempsque celles-ci étaient restées imprimées sur mes poignets.
J’avais eu plus de mal à dissimuler la crainte d’êtreentièrement à sa merci que mon absence d’excitation.
La seule chose qui alors m’avait donné l’énergie de ne pas toutlaisser tomber étaient ces diamants, justement, ainsi que leurorigine à laquelle moi-même souhaitais parvenir.
“Cela fait huit mois que je travaille pour toi”, luirappelai-je.
“Et alors ?”
“Je m’abandonne à toi, m’imaginant être importante pour toi ; aufinal, je découvre qu’il y en a une autre”, m’enflammai-je avec uneindignation feinte.
Sans croire à cette scène de jalousie, il me demanda, “Queveux-tu, Danielle ?” Le fait était que le masque de glace quej’arborais habituellement, me montrant insensible et détachée detout, ne rendait pas crédible cette scène digne d’un feuilletonsentimental.
“C’est toi que je veux”, murmurai-je, le fixant du regard etposant mes lèvres sur les siennes avec impétuosité. Ce fut unbaiser rageur, tout ce que j’éprouvais à cet instant… Rage d’avoirdû coucher avec lui, rage de devoir mentir au quotidien, alorsqu’au fond de moi je n’aspirais qu’à accéder à ses ressourcesillimitées et m’approprier ses contacts, avant de disparaître enfindans le néant.
“Alors mets-toi à genoux et suce-moi”, me défia-t-il, tout encontinuant à me palper de ses mains.
“Je ne suis pas ta pute !” râlai-je énervée, parce que jen’étais pas parvenue à lui soutirer une bribe d’information, ainsiqu’à cause de sa façon de me manipuler et provoquer ma jouissancecontre ma volonté.
“Que se passe-t-il, Danielle : tu n’es plus disponible ? Cettefois tu ne dois pas me distraire comme lorsque que je t’avaissurprise à fourrer ton nez dans ce qui ne te regardait pas”, mesouffla-t-il à l’oreille et, me saisissant par les cheveux, ilapprocha mon visage du sien.
Je me mordis les lèvres d’inquiétude et d’énervement.
Il m’avait surprise alors que j’étais à un doigt de savoir quiétait son contact. Je me rappelais très bien cet épisode, troisjours auparavant dans cette même pièce…
Ma couverture allait sauter d’une minute à l’autre, j’avais lula suspicion dans les yeux d’Aleksej et j’avais compris que j’avaiscommis une erreur impardonnable.
La seule issue pour ne pas être chassée et perdre tout ce quej’avais fait pour parvenir jusque-là fut de l’embrasser et de luioffrir ce qu’il désirait depuis le jour de notre premièrerencontre.
Je m’étais faite baiser contre la bibliothèque située à troispas de là.
À un certain point il m’avait attachée avec des cordes etm’avait suspendue à un crochet qui dépassait en haut de labibliothèque.
Consciente qu’il me mettait à l’épreuve, je m’étais laisséefaire.
J’étais parvenue à ne pas bouger un seul muscle malgré laterreur qui, telle un venin mortel, envahissait toutes les fibresde mon corps.
Je m’étais faite prendre à ses conditions, sans réagir à sesmanières brusques et sauvages.
A ce moment précis je sentais qu’il allait agir de même.
J’aurais voulu me retirer, sachant qu’au fond il aurait acceptéparce qu’il était un gentleman. Mais ses insinuations me pesaient,telle une épée de Damoclès suspendue au-dessus de ma tête, donc jele laissai faire.
“Tu me déçois, Aleksej. Tu ne fais pas la différence entre unefemme qui veut baiser avec toi et une qui veut te rouler”, leprovoquai-je, consciente de signer mon arrêt de mort.
“Tu as besoin d’une bonne leçon”, murmura-t-il d’une voixrauque, me penchant sur le bureau.
Il me maintint fermement par les cheveux, tandis que de l’autremain il relevait ma jupe et baissait son pantalon avant d’arracherdéfinitivement ce qui me restait de lingerie intime.
Il me fit écarter les jambes et, avant que je puisse meredresser, je le sentis me pénétrer d’une poussée puissante, meremplissant au-delà de ce que je m’imaginais.
Je hurlai d’effroi.
Je m’efforçai de me rebeller mais, plus je me débattais, plusson membre me pénétrait furieusement et en profondeur.
“J’adore le fait que tu sois toujours si humide etaccueillante”, murmura-t-il d’une voix grave, pendant qu’ilaccélérait ses mouvements.
Je haïssais ses paroles parce qu’elles disaient la vérité.Personne ne m’avait jamais baisée de cette façon et, bien que je leméprisasse, il me soumettait et me faisait sentir inférieure à lui.La chose me plaisait et, au fond, m’excitait bien plus que je nel’aurais jamais cru.
Subitement je sentis ses mains parcourir mes flancs jusqu’àparvenir à mes seins qui dépassaient du décolleté.
Je ne pouvais pas le voir, mais je sentis ses doigts pincer mestétons et les triturer jusqu’à les rendre turgescents et gonflés,me provoquant une gêne agréable quand ils frottaient contre le boisdu bureau à chacune de ses poussées.
“Aleksej”, murmurai-je, en proie à un désir incontrôlable,tandis que lui, ramenant ses mains sur mes flancs, les glissaitentre mes cuisses jusqu’à atteindre mon petit bouton auquel ilprodigua le même traitement qu’à mes tétons.
En quelques secondes mon corps se contracta sous les spasmesd’un orgasme qui me frappa avec la violence d’une tempête.
“Assez, je t’en prie”, le suppliai-je, sentant mon corps secontracter autour de son pénis qui continuait à fourailler dans monvagin et ses mains qui n’arrêtaient pas de me titiller.
“C’est moi qui décide quand arrêter”, m’avertit-il d’une voixdure et inflexible. “Je veux que tu jouisse à nouveau”.
“Je n’en peux plus”, haletai-je, tandis que mon corps selaissait emporter à nouveau entre les mains d’Aleksej.
À un certain point, je le sentis venir en moi.
Je soupirai de satisfaction, espérant que cette torture allaitprendre fin. Mais je me retrouvai encore poussée vers l’avant, unede ses mains sur mon sein et l’autre au niveau du clitoris.
Excitée par son orgasme qui palpitait encore à l’intérieur demoi et par ses doigts qui glissaient entre mes cuisses, un nouvelorgasme me traversa en profondeur.
“C’est bien, ma petite babouchka”, dit-il en souriant, me libérant de soncorps.
Je me rhabillai précipitamment, essayant d’effacer de ma mémoirece que nous venions d’accomplir.
Le string était irrécupérable, donc je le jetai.
Sur ces entrefaites, Aleksej ouvrit un tiroir de son bureau eten sortit une petite boîte qu’il me tendit.
“Qu’est-ce que c’est ?”, demandai-je en m’asseyant sur sesgenoux.
“Ouvre-la.”
J’obéis et trouvai à l’intérieur une bague en or blanc, sertiede diamants. La pierre au centre était un diamant taille brillant,entourée de deux gouttes d’eau en diamant. C’était une bagueexceptionnelle, la plus belle qu’il m’eût été donné de voir.
“Qu’est-ce que ça veut dire ?”
“À toi de voir.”
“Je ne suis pas une putain”, clarifiai-je, enfilant la bague àmon annulaire droit avec une certaine avidité.
“Je n’ai jamais dit qu’il s’agissait du paiement de taprestation.”
“Non, mais tu y as pensé.”
“Je pense ce que bon me semble ; fais-en autant en ce qui teconcerne.”
“Alors je prends cette bague comme une proposition venant detoi”, le défiai-je, résolue à lui rendre la vie infernale, au moinsautant que celle que j’avais vécue à ses côtés pendant desmois.
Il s’assombrit instantanément : “Une proposition ?! Quel genrede proposition ?”
“De mariage”, m’écriai-je, incapable de croire à mes propresparoles. Comment pouvais-je imaginer pareille chose ? Est-ce que jedevenais folle, ou bien le voisinage d’un tel homme me faisait-ildésirer des choses que je n’aurais jamais envisagées ?
“Quoi ?!”
“Oui, je le veux, Aleksej. Je vais t’épouser”, poursuivis-je,jouissant largement du mécontentement apparu sur son visage, avantd’éclater de rire.
En guise de réponse, il me chassa : “Va-t-en ! J’ai àfaire.”
“Moi aussi. J’ai un mariage à préparer”, ricanai-je.
Aleksej marmonna quelque chose en russe que j’eus un peu de malà comprendre. Il venait de dire qu’il m’épouserait plutôt mort quevif.
“Aleksej, mon chou, tu sais bien que je ne parle pas russe.Dis-le dans ma langue, s’il te plaît.”
“Je t’ai dit de disparaître. J’attends quelqu’un et je tiens àle rencontrer seul. Nous devons parler affaires”.
Son ton sérieux et son regard déterminé me firent comprendre quel’invité attendu était une personne très importante.
De qui s’agissait-il ? J’avais absolument besoin de le savoir,donc je cherchai à temporiser et tentai de l’embrasser pour gagnerdu temps, mais, à nouveau, il m’écarta.
“Ne m’oblige pas à être impoli, Danielle.”
“OK, tu as gagné”, dis-je avec un soupir de renoncement. Enarrivant à la porte, je pus entendre Aleksej répondre au téléphoneet dire aux gardes de faire entrer l’invité. Il le dit en russemais je saisis parfaitement chacune de ses paroles et je savaisque, si je voulais épingler cette personne, il m’aurait fallutrouver une excuse pour descendre dans le salon en passant par lecouloir principal et le grand escalier.
Je me dirigeai lentement vers la porte et sortis.
Au lieu de retourner dans la chambre qui m’était assignée, jecontinuai mon chemin dans le couloir central qui débouchait sur legrand escalier, lequel se séparait en deux branches symétriquesopposées qui menaient toutes les deux au salon durez-de-chaussée.
Avec une véritable satisfaction, je croisai l’invité d’Aleksejau moment où il gravissait les marches de l’escalier.
Il portait des lunettes de soleil qui cachaient en partie sonvisage, mais il avait quelque chose de familier.
Je m’attardai encore un peu, attendant qu’il parvînt au sommetdes marches pour passer à côté de lui.
Il me jeta un coup d’œil qui ne m’échappa pas, mais ilpoursuivit son chemin, comme si de rien n’était.
J’aurais voulu m’approcher et lui parler, mais je savais qu’unetelle attitude aurait suscité des soupçons ; or je ne pouvais pasrater cette occasion unique de connaître la personne avec laquelleAleksej faisait la contrebande de diamants ou par l’entremise delaquelle il les échangeait contre autre chose.
Huit mois que j’attendais cet instant.
J’en étais arrivée à coucher avec ce russe pour pénétrer dansson domicile, là où je savais qu’avaient lieu les rencontres lesplus intéressantes et profitables.
Et maintenant l’occasion se présentait devant moi !
L’homme me frôla et je feignis l’indifférence mais, alors quej’allais emprunter l’escalier, je respirai l’odeur de son after-shave.
C’était un parfum particulier et très cher.
Je ne connaissais qu’un seul homme qui en mettait.
Un homme avec lequel j’avais eu une relation pendant près d’uneannée, relation basée sur de brèves rencontres épisodiques axéessur le sexe, ainsi que quelques bavardages au cours desquels nouséchangions sur le travail et nos rêves de gloire.
Près d’une année s’était écoulée depuis notre dernière rencontremais, en un instant, l’image de mon ex- me revint à l’esprit.
Des cheveux blonds, les yeux bleus, une mâchoire carrée, le nezaquilin, taille et poids moyens…
J’étouffai un sursaut : “Ryan !”
Du coup je me retournai, bouleversée.
Lui aussi s’était retourné et il avait ôté ses lunettes.
Ses cheveux étaient plus longs et il portait la barbe, maisc’était vraiment lui.
Comment était-ce possible ?
Je repensai à cette année-là avec lui et aux problèmes quej’avais eus…
Je me rappelais toutes les fois où je lui avais confié mesdoutes sur le fait que quelqu’un de mon entourage me roulait.
“Comment as-tu pu me faire ça ?”, je compris à l’instant :c’était lui qui m’avait mis des bâtons dans les roues depuis lecommencement.
Ce fut à cet instant précis que je compris à quel point ilm’avait manipulée et comment il s’était efforcé de compromettre mesplans.
Instinctivement, je cherchai mon pistolet caché dans le fond dela poche de ma jupe, mais je me rendis compte trop tard de l’avoirlaissé dans ma chambre lorsqu’Aleksej m’avait fait appeler.
Ryan en fit autant et je vis soudain le canon de son arme pointévers moi.
“Kendra, ne le prends pas pour toi, mais un seul de nous deuxsortira vivant d’ici.”
“Il n’est pas nécessaire qu’il en finisse ainsi”, tentai-je dele convaincre, descendant lentement les marches sans lui tourner ledos.
Il était clair qu’il allait me trahir auprès d’Aleksej ; àpartir de cet instant-là il n’y aurait plus d’issue pour moi. Ilfallait que je quitte la villa à toute allure !
De plus, suite à l’affront que j’avais subi, la colère m’incitaà saisir mon téléphone portable pour appeler immédiatement mescontacts à l’extérieur afin de leur dire de se méfier de Ryan.
“Que diable se passe-t-il ici ?”, gronda la voix d’Aleksej,détournant l’attention de Ryan.
J’avais suffisamment d’expérience pour comprendre que j’étaisgrillée, donc je fis l’unique chose qui fût encore possible : jepris le téléphone et commençai à écrire un message pour expliquerce qui se passait.
“Lâche ce portable !”, hurla Ryan hors de lui dès qu’il s’enrendit compte, me bloquant peu avant que j’envoie le message.
Je vis Aleksej arrêter Ryan d’un geste et se diriger versmoi.
Son regard ressemblait à une fine plaque grise de verglas, prêteà se briser et éclater en mille fragments, lesquels toucheraientquiconque était à proximité.
Près de huit mois dans son entourage m’avaient appris qu’iln’aurait pas hésité à me faire payer chèrement chaque secondepassée auprès de lui et que j’avais exploitée à des finspersonnelles.
Le pardon était une chose qu’il ne m’aurait jamais accordée.
Je n’avais aucun doute à ce sujet.
Il ferait tout pour me détruire. Mais seulement après uneconfession complète pour qu’il découvre jusqu’à quel degré j’étaisparvenue en agissant de cette manière pendant tout ce temps.
“Donne-moi ton portable”, souffla-t-il d’une voix basse à un pasde moi, tendant sa main.
Je donnai un rapide coup d’œil à l’écran, regrettant les anciensportables où il suffisait d’appuyer sur une touche facile àidentifier du bout des doigts, au lieu d’être tout visuel.
Il ne me restait plus qu’à faire “Envoi” avec le pouce.
J’allais le faire, lorsque la main d’Aleksej parvint rapidementjusqu’à moi.
Je n’eus que le temps de déplacer le bras pour l’éviter mais,simultanément, un coup de feu retentit dans la villa.
Je ne me rendis pas compte du projectile qui venait dans madirection, lorsqu’une violente douleur au niveau la poitrine mecoupa la respiration et, me poussant en arrière, me fitbasculer.
Les talons de mes chaussures perdirent leur point d’appuihabituel et, avant que je puisse agripper le bras d’Aleksej, jebasculai dans le vide.
Je perçus à peine le contact des doigts d’Aleksej avant decommencer à plonger vers ma propre fin.
La dernière chose dont je me souvins était son nom que jeprononçai faiblement, comme un appel à l’aide désespéré et puis…la douleur.
La douleur seule me fit sentir encore vivante, malgré la ballelogée à quelques centimètres de mon sternum et les chocs répétéssur les marches de l’escalier au bas duquel je roulai.
Et puis le noir absolu.

2

ALEKSEJ
Quarante-huit heures s’étaient écoulées depuis cet épisode defolie qui avait eu lieu chez moi.
Des heures passées à pester contre moi-même pour ne pas m’êtrerendu compte de la duplicité de Danielle Stenton, alias KendraPalmer.
Comment avais-je pu être aussi naïf ?
Comment avais-je pu ne pas m’apercevoir de sa véritable nature?
J’avais bien eu quelques soupçons !
Était-il possible que la beauté de cette femme m’ait ébloui aupoint d’en perdre la tête jusqu’à devenir stupide et aveugle ?
Moi qui m’étais toujours flatté d’avoir un sixième sensinfaillible pour repérer les escrocs et les menteurs.
Mon Dieu, je ne pouvais pas y croire : j’avais eu une tellepersonne à mes côtés pendant huit longs mois sans m’enapercevoir.
En vérité, je m’étais laissé prendre par cette envie furieuse decoucher avec elle et de faire plier son caractère rebelle etarrogant !
J’avais été tellement aveuglé par mon désir et ses manièresfuyantes et provocantes à la fois de rester auprès de moi, que j’enavais perdu la raison.
Je me doutais bien que cette proximité pouvait devenirdangereuse, mais Kendra était toujours si excitante que je nepouvais que la garder à mes côtés.
Je me répétais sans cesse que je n’avais été qu’un idiot car,dès le début, j’avais perçu quelque chose de retors en elle.
Dès notre première rencontre, alors qu’elle s’était jetée devantles roues de ma voiture tandis que le chauffeur sortait lentementdu parking, j’avais compris que cet accident était arrangé.
J’étais descendu du véhicule avec la furieuse envie de fairepayer sa plaisanterie à la victime, prêt à la menacer si elle avaitcommencé à parler de porter plainte.
Quand subitement je l’avais vue.
Elle. Par terre. Le genou endolori, heurté par la voiture, et lebras éraflé pour se protéger le visage en tombant surl’asphalte.
Malgré la situation, j’avais été fasciné par son corps à couperle souffle, enveloppé dans une robe noire et très courte qui nelaissait pas de place à l’imagination.
Mon chauffeur l’avait aidée à se relever pendant qu’ellel’insultait pour l’avoir renversée.
Puis, m’approchant d’elle, je lui avais demandé si elle allaitbien.
En moins d’un instant je m’étais retrouvé prisonnier de ses yeuxgris magnifiques, chargés de menaces comme un ciel couvertannonçant l’orage.
Son visage délicat et ses longs cheveux châtains qui couvraiententièrement son dos découvert avaient attisé mon désir de latoucher, qu’elle fût mienne.
Pour ces raisons, je lui avais proposé de la conduire àl’hôpital ; mais elle s’était aussitôt raidie et effrayée,affirmant qu’elle allait parfaitement bien, même si elle avait dumal à marcher. Je saisis la balle au bond et l’invitai dans l’hôteloù je séjournais.
Elle avait accepté, mais ce que je croyais être le prélude d’unenuit de folies au lit, s’était révélé exactement l’opposé.
Elle avait fait quelques difficultés à me donner son nom,Danielle Stenton, et lorsque je m’étais aventuré un peu, ellem’avait arrêté immédiatement, disant qu’elle n’avait pas accepté deme suivre pour se faire conduire au lit mais simplement pour avoirdes soins, mettre de la glace sur son genou endolori et bénéficierd’un lit chaud où passer la nuit, seule.
Je n’étais pas parvenu à obtenir d’elle la raison pour laquelleune femme aussi avenante pouvait avoir besoin d’un endroit oùpasser la nuit, mais j’avais compris tout de suite que cet accidentn’était qu’un prétexte pour me soutirer de l’argent.
Le lendemain, le fait qu’elle me demandât un prêt ne m’avait passurpris.
J’avais naturellement refusé, mais elle m’avait surpris enproposant de travailler pour moi.
Ce n’était pas une demande de sa part et, de mon côté, je nepouvais pas refuser.
Une faiblesse que j’allais payer très cher étant donné queKendra avait découvert beaucoup de choses sur mon compte. En plus,l’avoir conduite chez moi était l’apogée de cette histoiredélirante car c’était là où je conservais mes biens et mes affairesles plus importantes.
En cet instant précis je compris que, jouant sur les sentiments,Kendra était parvenue à obtenir ce dont elle avait besoin : entrerdans la villa et profiter de la liberté que je lui accordais pourme trahir et employer tout ce qu’elle pouvait amasser contremoi.
Et tout ça pour tirer un coup !
Quel idiot !
J’étais encore en train de ressasser mes erreurs, lorsque Kendraouvrit les yeux.
Après que les médecins m’eussent annoncé son réveil imminent, jem’étais précipité dans la clinique privée pour la confronter et luifaire payer les mensonges et les tromperies qu’elle m’avait faitssubir.
Au point où j’en étais, j’avais pris un revolver avec moi parceque, après la discussion animée avec Ryan concernant la véritableidentité de cette femme, je ne lui faisais plus confiance et jen’allais pas hésiter à me venger.
Je m’assis calmement sur le rebord du lit, à côté d’elle,attendant qu’elle fût totalement éveillée, les médicaments qu’onlui donnait ayant la faculté de l’étourdir.
Malgré l’hématome violet sur la pommette droite et la pâleurmortelle de son visage, elle était toujours très belle, d’unebeauté qui dorénavant m’indifférait, me répugnait même.
J’attendis que ses yeux se posent sur moi.
Son regard argenté paraissait noyé dans le vide à cause desantidouleurs, mais ses yeux s’écarquillèrent en se posant surmoi.
Je lui souris avec satisfaction et m’approchai lentement de sonvisage, savourant cette étincelle de peur et de surprise que jelisais dans ses yeux.
“Eh bien, petite menteuse, es-tu prête à payer les conséquencesde tes mensonges ?”, chuchotai-je à voix basse.
Je la vis entrouvrir se lèvres charnues et parfaitementdécoupées, mais aucun son n’en sortit.
“Je considère que ton silence équivaut à une approbation”,décidai-je, en saisissant le pistolet au fond de ma poche.
“Qui es-tu ?”, me demanda-t-elle faiblement, alors que jem’apprêtais à saisir l’arme.
J’éclatai de rire, un rire guttural et froid, presque unemenace.
J’aurais voulu la prendre par le cou et la jeter au bas du lit,tant j’étais furieux.
“Sérieusement, tu veux encore jouer avec moi ? En es-tu si sûre?”, lançai-je, décidé à ne pas me faire rouler de nouveau.
“Je… Je ne sais pas… Je”, balbutia-t-elle mal à l’aise,regardant autour d’elle d’un air éperdu.
“Fais attention à ce que tu dis Kendra, je ne te donnerai pasune seconde chance. Me suis-je bien fait comprendre ?”, dis-je enl’arrêtant, mais ma menace sembla déclencher la réactioninverse.
“Qui est Kendra ? ", demanda-t-elle, commençant à trembler et às’agiter.
Elle semblait terrorisée.
“Où suis-je ?”, balbutia-t-elle, essayant de se relever pours’asseoir ; mais elle ne fit qu’aggraver la douleur, ce qui la fitgémir. “J’ai mal !”, dit-elle dans un souffle, se portant la main àla poitrine, à l’endroit où la balle l’avait frappée. Dans unmurmure elle demanda : “Que m’est-il arrivé ?”, engourdie etsouffrante, fixant son bras bandé et touchant les bleus sur sonvisage et ceux de ses jambes qu’elle dégagea des couvertures.
Cela ne dura qu’un instant. Subitement, tout ce calme apparentdisparut, laissant la place à la peur de Kendra qui se débattitcomme un animal en cage.
Tremblante et ébranlée, elle arracha la perfusion et essaya dese lever.
“Inutile de s’enfuir. ” La saisissant par les bras, je laplaquai sur le lit au moment où elle tentait de se relever.
Il fut assez difficile de parvenir à l’immobiliser, tant elle sedémenait, de manière frénétique et désordonnée, à cause de ladouleur.
Essayant de se mettre debout, malgré tout, en s’appuyant sur lesjambes, je vis qu’elle titubait.
Elle était pâle comme un linge et je dus la saisir à la taillepour qu’elle ne tombe pas mal au sol.
Kendra se laissa tomber sur moi.
“La tête me tourne”, murmura-t-elle en passant ses bras autourde mon cou.
Je la soulevai et elle se serra fort contre moi, comme si ellecraignait de choir dans le vide.
Je la reconduisis au lit et, lentement, ses mains se détachèrentde mon cou, me glissant sur les épaules et le long de mes bras.
Si elle n’avait pas été aussi bouleversée et tremblante,j’aurais pu croire qu’elle me provoquait afin de me séduire.
Son touche léger et délicat avait quelque chose d’intime et detendre, mais je ne me laissai pas émoustiller.
J’allais me retirer lorsque sa main droite s’empara de lamienne.
Son tremblement cessa instantanément.
Je la fixai.
De son côté elle m’examinait. Son expression était perturbéemais ses yeux me regardaient fixement comme si elle espérait ytrouver une réponse.
“Et maintenant, te souviens-tu de moi ?”, demandai-je.
De nouveau confronté à son silence, je me détachai d’elle mais,à peine ma main abandonna la sienne, Kendra, effrayée, sursauta etse souleva brusquement pour la reprendre.
Un geste qui lui engendra une nouvelle douleur à lapoitrine.
La douleur la fit hurler et cela l’empêcha de se pencherdavantage pour m’atteindre.
***
KENDRA
J’avais la tête qui palpitait sourdement et je ne comprenaisrien.
Mon cerveau était vide de tout souvenir et ombre de raison, iln’était plus que douleur et confusion.
Cet homme devant moi m’effrayait mais, en même temps, il merassurait un peu. Était-ce dû au fait qu’il semblait me connaître ?Mais son regard et son attitude, sévères et implacables,résonnaient comme une sirène d’alarme pour moi.
Une partie de moi-même voulait s’enfuir tandis que l’autre mesuppliait de rester et de lui demander de l’aide.
Je ne savais pas quoi faire et, quand une nouvelle vague de peuret de douleur me submergea, ce ne fut qu’entre ses bras que jeperçus quelque chose de vaguement familier.
Peut-être était-ce le parfum de sa peau ? Une essence de bois,fraîche et chargée d’arômes. Intense et virile. Elle me rappelaitconfusément quelque chose… mais quoi ?
Et ce visage…
Je l’avais déjà vu, mais tout était si confus dans mon esprit,du moins jusqu’à ce que mon regard fût attiré par le sien.
Je percevais quelque chose dans ces yeux d’un noir d’ébène. À lafois quelque chose de sauvage et de maîtrisé. Puissant etmagnétique mais également élégant, à l’image des habits qu’ilportait.
Tout de suite, j’avais ressenti une certaine timidité face à ceregard qui me fixait, comme si j’avais l’habitude de reculer pouréviter de déchaîner son côté agressif, qui semblait prêt à jaillirhors de lui pour détruire quiconque se fût trouvé dans lesparages.
Cette voix enfin… Oui, je la connaissais. J’en étais sûre.C’était cette voix qui m’avait tant déconcertée parce que j’étaissûre de l’avoir déjà entendue ; mais c’était ce ton grave, rude etavec un accent étranger, qui m’avait rendue nerveuse.
Même ses paroles m’avaient effrayée.
J’avais recherché leur signification, la raison pour laquelle ilétait autant en colère contre moi, mais je ne l’avais pastrouvée.
Cette pensée m’avait fait perdre mon calme et j’étais prête àfuir ce danger que je sentais planer au-dessus de moi, telle uneépée de Damoclès.
J’étais terrorisée et toujours plus affaiblie, tant et si bienque mes jambes ne me portaient plus, mais, prise de vertige,j’avais pu reprendre mon souffle entre ses bras, rassurée parl’odeur de sa peau.
Toutefois, il m’avait laissée et, tandis que mes mainsparcouraient ses bras jusqu’à la pointe de ses doigts, je sentis àl’improviste la panique me submerger et m’étouffer.
Quand je vis sa main se séparer de la mienne, je fus envahied’une peur inexplicable.
Je me voyais de l’extérieur, comme une spectatrice, pendant quemon corps tendait vers ce qui semblait être la seule issue avant detomber définitivement dans le néant.
Je bondis en avant quand, à l’improviste, une douleur à lapoitrine, un peu en dessous de l’épaule gauche, me transperça commesi on me poignardait.
Cela ne dura qu’un bref moment et, l’instant d’après, le monderéel s’obscurcit autour de moi.
Je me sentis déconnectée de la réalité, comme si j’avais étéparachutée dans un autre univers.
J’étais au sommet d’un grand escalier, ample et élégant.
La main de cet homme était devant moi.
Elle était tendue vers moi et je pouvais sentir mon corps tendrevers elle, mais la douleur dans ma poitrine revint encore plusforte qu’auparavant.
J’eus la respiration bloquée dans la gorge pendant que mon corpstombait en arrière, basculant dans le vide.
En vain je m’efforçai de contraster cette force invisible quim’entraînait dans le gouffre, sans y parvenir.
Devant moi il n’y avait que cet homme penché en avant pour merattraper.
Je vis sa main tendue vers moi mais je ne pus l’effleurer qu’unefraction de seconde.
Je levai brièvement les yeux avant de tomber.
Mon regard croisa celui de cet homme.
J’y perçus une ombre de peur et d’incrédulité.
Je murmurai : “Aleksej”, à la recherche désespérée d’aide, alorsque sa main s’éloignait de plus en plus et la douleur grandissaitjusqu’à devenir intolérable.
Puis tout disparut dans le néant.
Une obscurité seulement déchirée par mes hurlements mêlés à ceuxde cet homme qui appelait un médecin.
Mon cœur battait à tout rompre et, le corps secoué de peur, jerouvris les yeux pour m’apercevoir que je pleurais.
J’étais totalement recroquevillée sur moi-même, telle unefeuille morte avant qu’elle finisse à la poubelle.
Je clignai les yeux pour me libérer des larmes et je la visenfin : la main de cet homme était entre les miennes.
Je la serrais fort au point de lui enfoncer les ongles dans lapeau.
Cette image fut comme un doux réveil pour moi.
“J’y suis parvenue… Je t’ai attrapé…”, balbutiai-je, secouéeà la fois de pleurs de soulagement et de ce qui paraissait être unehallucination étant donné que j’étais revenue dans la chambreblanche où je m’étais réveillée.
“Que dis-tu ?’, me demanda-t-il confus, la respirationsaccadée.
“Je… J’allais tomber. Aleksej…”, m’efforçai-je d’expliquer,sans toutefois parvenir à l’exprimer. J’étais anéantie au point dene plus être capable de construire une phrase structurée.
“Tu te rappelles de moi maintenant”, siffla-t-il avec une nuancede sarcasme dans la voix qui me perturba.
Aleksej.
Oui, je me souvenais de lui, même s’il ne s’agissait que d’unnom et d’un corps physique sans aucune identité pour le moment.
Une petite lueur d’espoir et les souvenirs d’un passé lointainet encore confus.
J’ébauchai un sourire de soulagement.
A ce moment-là, le médecin arriva, accompagné de deuxinfirmières.
Aussitôt j’entendis l’homme se fâcher et crier quelque chose. Ilme fallut du temps pour comprendre qu’il s’exprimait dans une autrelangue.
Une langue que, petit à petit, je me rappelais avoir connue.
Ils parlaient de choc post-traumatique, d’hémorragie cérébraleen cours de résorption, d’anxiolytiques, tandis que l’homme à moncôté était furieux de n’avoir pas été informé de ce qui venaitd’arriver : il hurlait qu’il les payait suffisamment pour obtenirdes réponses à propos de ma santé et pour me guérir.
“Nous ne savons pas le temps que cela prendra mais,certainement, pas moins d’une semaine”, tenta de dire le médecindans la même langue.
“Une semaine ?!”, se fâcha l’homme.
“La laisser sortir plus tôt serait risqué. Il faut du temps pourque la micro-fracture au crâne cicatrise et l’hémorragie n’est pasencore totalement résorbée. Vu les circonstances, l’hospitalisationne peut être inférieure à deux semaines.”
“Je ne veux pas rester ici !”, dis-je, me mêlant de laconversation, serrant contre moi cette main que je ne voulais plusquitter.
“Tu parles également russe… Comment se fait-il que la chose neme surprenne pas ?”, siffla nerveusement l’homme, et il m’adressaun regard si tranchant que j’en eus le souffle coupé.
Tirant d’un coup sec, il dégagea sa main de mon étreinte.
“Non…”, soufflai-je faiblement, comme s’il n’y avait plusd’air dans mes poumons.
“Gardez-la aussi longtemps que vous voulez, mais je veux quecette mascarade finisse”, gronda l’homme et, se levant de mon lit,il se dirigea vers la porte. “Quant à toi, Kendra, tu as jusqu’àdemain pour… recouvrer la mémoire. Il y a belle lurette que larécréation est terminée.”
“Aleksej”, murmurai-je, angoissée à nouveau. Mais il s’en alla,me laissant livrée à moi-même et à ces médecins qui m’auscultèrentimmédiatement et me noyèrent de questions.
Je m’effrayai parce que, au fil des questions qu’ils meposaient, la conscience d’avoir un gros trou noir dans le cerveause faisait jour.
La question qui me tourmentait était mon identité : qui suis-je?
Aleksej était la dernière chose dont j’avais conservé unsouvenir.
Il était l’unique point d’appui pour m’éviter de retomber dansl’angoisse.
Je me demandai qui j’étais et je me rappelai qu’il m’avaitappelée Kendra, mais ce nom ne me disait rien.
Je demandai plusieurs fois des nouvelles d’Aleksej auxinfirmières, mais elles donnaient l’impression de ne pasm’écouter.
Je sentis la panique monter en moi mais, avant que je puisseréagir et courir vers la seule personne dont je me souvenais, lemédecin me fit une injection et je m’endormis peu après.

3

KENDRA
“Kendra, es-tu prête à te concentrer de nouveau pour visualisertes souvenirs ?”, me demanda gentiment la psychologue à laquelles’était adressé le neurologue, faisant suite à deux jours de soinspour juguler mes accès de panique et les crises de nerf qui mefrappaient depuis que je m’étais rendue compte d’avoir perdu lamémoire.
Malheureusement, malgré la psychologue, mon état ne s’amélioraitguère.
À chaque fois que je fermais les yeux, je revivais la même scène: moi, en train de tomber dans les escaliers tandis que j’essayaisde saisir la main d’Aleksej.
La doctoresse m’avait expliqué qu’il ne s’agissait pas d’unehallucination mais d’un retour sur ce qui m’était arrivé, lescirconstances qui m’avaient conduites à l’hôpital, grièvementblessée, avec en particulier une fracture de la boîte crânienne,une cheville déboîtée, une fissure du ménisque, une lésion au brasdroit, un bleu au visage et une vilaine blessure à la poitrine dontj’ignorais encore la cause.
Pour les médecins j’étais une miraculée car, suite à cettechute, j’aurais pu y passer ou bien rester paralysée pour lerestant de mes jours.
Au cours des deux derniers jours, j’avais subi tout un tasd’examens et, finalement, l’hémorragie cérébrale avait disparu, àla satisfaction générale.
Aleksej, toutefois, n’avait pas reparu et, plus le tempspassait, plus j’étais agitée.
J’avais demandé de ses nouvelles à plusieurs reprises, siquelqu’un connaissait le motif de sa colère à mon encontre ; maistous avaient éludé mes questions avec un certain embarras.
“Kendra ?”, me rappela la psychologue, me ramenant à laréalité.
“Je vous l’ai déjà dit et répété. Je ne me souviens de rien. Jene sais ni mon nom, ni où j’habite, ni comment j’ai fait pouraboutir ici ; et même si cet homme s’appelle Aleksej, en réalité jene me rappelle rien de lui. Tout ce que je sais de lui est qu’il meconnaît et semble vraiment fâché contre moi… Que lui ai-je fait ?Pourquoi me connaît-il ?”
“Revenons à toi.”
“Je n’en peux plus de toutes ces questions auxquelles je suisincapable de répondre”, éclatai-je en sentant une migraine mesaisir, comme à chaque fois où je me troublais ou m’efforçais de mesouvenir.
“J’essaie simplement de t’aider.”
“Eh bien, si vous voulez m’aider, appelez Aleksej. Je suis sûrequ’il sera en mesure de répondre à vos questions et jepourrai…”
“Tu pourras ?”
Je marmonnai : “Rien”, l’air embarrassée. Je ne voulais pas luiavouer combien je me sentais seule avec mes peurs et mesquestionnements, dans ce lit d’hôpital, seulement entouréed’étrangers.
Bien qu’il me fît peur, Aleksej était le seul souvenir qui merestait. La dernière chose qui me raccrochait à cette miette deraison sans laquelle je sombrerais dans la folie.
“Monsieur Vasilyev n’est pas disponible pour le moment.”
“Êtes-vous en train de parler d’Aleksej ?” Ce nom ne me disaitrien.
“Oui.”
Harassée, je m’écriai : “Je vous en prie, j’ai besoin de lui. Jene sais pas ce que j’ai fait de si grave pour qu’il me haïsse tant,si seulement je parvenais à me rappeler…”, et j’éclatai ensanglots.
“Kendra.”
“Je voudrais seulement lui parler et obtenir des réponses”,dis-je en sanglotant, pendant que mon esprit revenait au derniersouvenir qui me restait, me faisant désirer de rejoindre Aleksejpour me sentir en sécurité.
***
ALEKSEJ
Lorsque le nom du neurologue de la clinique apparut sur l’écrande mon portable, je fus saisi à l’instant d’un voiled’irritation.
“J’espère que vous m’apportez des bonnes nouvelles”, débutai-jesans préambule.
“Ce ne sont pas celles que vous attendiez, mais…”
Je coupai court, irrité : “Alors ça ne m’intéresse pas.”
“Monsieur Vasilyev, je vous en prie, croyez-moi si je vous disqu’il y a une probabilité réelle que la patiente souffre d’amnésierétrograde à cause du grave traumatisme crânien qui l’affecte. Ilne s’agit toutefois que d’une lacune mnémonique, exclusivement liéeaux souvenirs, et non aux gestes ou aux comportements. Le langagen’a également subi aucun dommage et la dame passe du russe àl’anglais sans la moindre difficulté. Sans compter que sa mémoirede court terme, ou post-traumatique, est intacte.”
“Je m’en fiche ! Je veux savoir ce qu’elle a fait au cours deshuit derniers mois”, m’emportai-je en tapant du poing sur latable.
“Il y des chances que la mémoire lui revienne”, bredouilla lemédecin, visiblement mal à l’aise.
“Je n’en crois rien. Vous êtes l’un des meilleurs neurologuessur place mais vous êtes stupide au point de n’avoir pas encorecompris que cette histoire d’amnésie n’est qu’une comédie.”
Le médecin me répondit sèchement : “Il existe encore pleind’inconnues dans mon domaine de compétence. Mais je peux vousassurer qu’il y a eu une lésion et qu’elle est encore là. À votreplace, je suggérerais que vous rendiez visite à cette femme.”
“Si elle ne s’est pas déjà échappée, bien entendu.”
“S’échapper ? Vous n’y pensez pas ! Sa chambre est soussurveillance constante, comme vous nous l’avez demandé. En outre,l’état de santé de la patiente est trop précaire pour qu’elle soiten mesure de se déplacer seule au-delà de quelques mètres.”
“Vous a-t-elle déjà demandé un téléphone portable ?”
“Oui.”
“Vous voyez bien que j’avais raison ! Elle essaie de vous rouler!”
“Elle nous a simplement demandé de vous appeler, à plusieursreprises”, répliqua le médecin.
“M’appeler, moi ?”
“En effet. La psychologue soutient qu'une sorte de dépendance àvotre égard s’est créé à cause du seul souvenir qui lui reste.Kendra Palmer souffre terriblement, elle se sent seule etabandonnée. Elle n’a personne et subit péniblement cette amnésiequi l’a frappée. Notre conseil est de revenir la voir, de luiparler en vous efforçant de mettre de côté la rancune que vous luivouez, à moins que vous ne vouliez lui dire toute la vérité.”
“Je ne rentrerai pas dans ses jeux tordus.”
“Je ne crois pas qu’elle soit en train de jouer mais, si vousvoulez des réponses, je pense que vous êtes le seul à pouvoir lesobtenir. Vous êtes à l’origine d’un premier souvenir chez elle. Quisait si votre voisinage n’en ferait pas ressortir d’autres.”

4

ALEKSEJ
“Où est-elle ?”, dis-je les dents serrées pour contenir macolère.
J’avais cédé sous la contrainte à ce chantage et à présentj’étais là.
Arrivé dans la chambre de cette sale menteuse, pour la guérisonde laquelle et pour garder ce lieu secret et sous surveillance jedéboursais des milliers de dollars, je trouvai son lit vide.
“Je ne comprends pas… Elle ne peut pas marcher toute seule…Nous l’avons raccompagnée ici il y a quelques minutes, après laséance de scanner”, me répondit l’infirmière.
“Cherchez-la et ramenez-la ici tout de suite”, ordonnai-je,avant de perdre toute patience.
J’essayais de deviner comment elle avait pu s’échapper lorsquej’entendis du bruit provenant de la salle de bain privée de lachambre.
À l’intérieur, je trouvai immédiatement Kendra.
Elle se tenait au rebord du lavabo pour éviter de tomber et seregardait dans le miroir.
Elle était encore plus pâle et plus maigre que lors de madernière visite.
“C’est moi, celle-là ?”, me demanda-t-elle, désespérée, pointantson image réfléchie.
Je m’approchai avec précaution et me plaçai à côté d’elle.
“D’après toi ?”
Elle murmura avec tristesse, les larmes aux yeux : “Je… Jen’en sais rien. Je ne me reconnais même pas.”
“Tu ne devrais pas te lever du lit seule”, lui reprochai-jequand je vis les difficultés qu’elle éprouvait pour se déplacer, aupoint que je dus la soutenir pour la reconduire au lit.
Elle me demanda : “Qui suis-je, Alexej ?”
“Donc tu es décidée à continuer avec ce petit jeu.”
“Pourquoi supposes-tu que je suis en train de jouer ? Suis-jed’une telle mesquinerie pour t’attendre et agir ainsi avec toi?”
“Oui”, répliquai-je, surpris par sa question et par son regardinquiet.
“Quel mal t’ai-je fait pour mériter une telle réponse de ta part?”
Je le lui rappelai : “Tu m’as trahie et menée en bateau”, mepenchant vers elle et la regardant fixement.
“Je ne me rappelle pas… Excuse-moi… Je ne sais même pas quije suis et tu sembles être la seule personne qui me connaisse.”
“En effet. Une connaissance chèrement payée.”
“Je suis désolée… Je ne sais pas quoi te dire.”
“Lorsque tu es venue vers moi et que tu as choisi de me suivre,je t’avais avertie de ne jamais tenter de me rouler.”
“Quand cela est-il arrivé ? Depuis quand nous connaissons-nous?”
“Huit mois”, lui répondis-je, m’efforçant de cueillir le moindresigne de tromperie dans son regard et dans sa voix.
“Ça ne fait pas longtemps.”
“Question de point de vue.”
“T’ai-je parlé de moi pendant tout ce temps, qui j’étais avantde te connaître ?”
Je le lui rappelai : “Tu as toujours été très évasive quant àton passé”, omettant les recherches que j’avais effectuées sur soncompte.
“Pourquoi ?”
“Peut-être à cause de ton passé criminel.” Ma réponse la fitsursauter de frayeur. Je l’observai avec attention : elle semblaitsincère.
“Moi, une criminelle. Oh mon Dieu ! Ai-je tué quelqu’un ?”,bégaya-t-elle mal à l’aise, les joues rouges de honte.
“Cela je n’en sais rien. Mais tu as passé deux années enprison.”
Kendra pâlit entièrement.
Déçu par l’incrédulité que je lisais dans son regard, jepoursuivis : “Pour vol de bijoux”. Je m’attendais à une riposte desa part ou de l’indignation pour mes dires. Mais au lieu de cela,rien.
“Je suis une mauvaise personne”, dit-elle, commençant à pleurer.“Pourquoi es-tu resté auprès de moi pendant ces huit mois ?”
“Tu venais de sortir de prison et tu avais aucun endroit oùaller. D’autre part mes affaires t’intéressaient. J’ai choisi de tedonner une chance, tout en sachant les risques encourus, mais jet’ai crue sur parole lorsque tu m’as jurée que jamais tu nem’aurais trompé.”
“T’ai-je volé ?”
“Tu as essayé et puis tu es allée au-delà.”
“T’ai-je fait du mal ? Est-ce pour cette raison que tu es sifâché contre moi ?”, s’efforça-t-elle de me demander, commençant àgémir à cause d’un mal de tête.
“C’est à toi de me donner des réponses”, répliquai-je avecsévérité, indifférent à sa migraine.
“M’as-tu poussée dans les escaliers ?”
“Non.” J’allais me lever pour partir mais je fus retenu par lamain gauche.
“Je t’en supplie, ne me laisse pas seule”, me dit-elle d’un tonsuppliant, peu avant de s’endormir.
***
KENDRA
Ce mal de tête ne m’avait plus lâché depuis qu’Aleksej étaitparti.
J’étais anéantie par ce qu’il m’avait raconté.
Il était déjà difficile de n’avoir plus aucun souvenir. Maisapprendre que j’avais un passé aussi lourd me fit presque désirerde ne jamais retrouver la mémoire.
Je me renfermai sur moi-même, réfléchissant à cela pendant touteune journée, lorsque, le soir suivant, Aleksej apparut.
À la différence des autres fois, il portait des jeans et uneveste en daim, au lieu du costume sombre et de la chemise blanchehabituels. Ses cheveux d’un noir de jais étaient toujoursparfaitement coiffés en arrière.
Il prit une chaise près du lit et s’assit, m’observantattentivement.
Je m’habituais à sa présence mais ses yeux étaient comme despuits obscurs dans lesquels on risquait de tomber. Il étaitimpossible de détourner le regard. Comme si un aimant m’attiraitvers lui jusqu’à m’engloutir.
“Salut”, lui dis-je, m’asseyant aussi.
“D’après les médecins tu es en voie de guérison. L’hémorragies’est résorbée et tu peux bouger le bras de nouveau”, commença-t-ilsans rendre mon salut.
“Oui… Je dois te remercier pour tout. Une infirmière m’aexpliqué que c’est toi qui paies toutes les dépenseshospitalières.”
“Exact.”
“Je promets de te restituer jusqu’au dernier centime.”
“J’en doute.”
“Je chercherai du travail. Tu sais, j’ai pensé à ce que tu m’asdit et j’ai décidé, quand bien même la mémoire me reviendrait, queje n’agirai plus de façon criminelle”, lui dis-je décidée,déterminée à considérer ce qui m’était arrivé comme un signe dudestin et à changer de vie.
Aleksej ne me répondit pas mais il semblait troublé, vu la façondont il passait continuellement les mains dans ses cheveuxnoirs.
Puis il se leva d’un coup, s’apprêtant à partir.
Pleine d’espérance, je me hasardai à lui demander, “Viendras-tume voir demain encore ?” Mais pour toute réponse il me lança uncoup d’œil fuyant et partit sans me dire au revoir. Commetoujours.
Cinq jours passèrent.
Chaque soir, à la même heure, Aleksej apparaissait à la porte,s’asseyait à distance et me regardait.
Pas de salutation ni d’allusion à mon état, étant donné que leneurologue le tenait au courant.
Un mur de silence se dressait entre nous, jusqu’au moment où jeposais une nouvelle question, à laquelle il avait toujours uneréponse prête.
C’est ainsi que j’avais appris ma date de naissance : le seizeoctobre, vingt-neuf ans plus tôt, à Seattle. Apparemment je n’avaisplus de rapport avec ma famille depuis pas mal d’années et tout cequ’Aleksej avait pu me dire était que ma mère, Ulita Smirnov, étaitd’origine russe, alors que mon père, Jacob Palmer, était américain.J’étais fille unique.
Je n’avais pas de domicile fixe ni un travail digne de cenom.
Je lui avais demandé ce que je faisais pour lui mais il nem’avait pas répondu.
“Eh bien, quelle est la question du jour ?”, commença Aleksej encet instant.
“Ai-je fait des études supérieures ?”
“Je n’en sais rien.”
“Ai-je des amis ?”
“Non.”
“Penses-tu que je devrais prendre contact avec ma famille ? Lefait de les voir m’aiderait peut-être à recouvrer la mémoire.”
“J’ai déjà fait des recherches à leur sujet, sans résultat.Peut-être ne sont-ils plus de ce monde.”
“Oh”, murmurai-je, accablée.
“Où irai-je lorsque je sortirai d’ici ? Es-tu vraiment sûr queje n’aie pas un domicile ?”
“Oui.”
“Alors où ai-je vécu pendant toutes ces années ? Où sont meseffets personnels ?”
“Ils sont chez moi.”
“Chez toi ?!”
“Oui.”
“Pourquoi ?”
Avant qu’Aleksej répondît, l’infirmière, qui m’avait conduitefaire une dernière résonnance magnétique quelques heures plus tôt,pénétra dans la chambre.
“Excusez-moi. Mademoiselle, je vous rapporte la bague que nousavions ôtée pour vous faire passer l’IRM. Pardonnez-moi pour ladistraction ; elle était tombée par terre et je ne l’avais pasvue”, bredouilla-t-elle d’un air embarrassée, regardant Aleksejavec crainte pendant qu’elle déposait la bague sur le bord de latable de nuit.
Au cours des derniers jours j’avais souvent joué avec cettebague, comme un anti-stress, sans jamais me demander quel rapportce bijou pouvait bien avoir avec moi. Mon esprit était trop confuset anxieux pour y penser.
Je remerciai l’infirmière et elle disparut aussitôt.
Je me penchai en avant pour saisir le seul objet personnel quime restait mais, involontairement, de l’extrémité de mes doigts, jele fis tomber par terre.
Je m’assis lentement, posai les pieds au sol et tentai dem’incliner. Mais la tête commença à me tourner et je sentais quemes jambes ne me porteraient pas si je devais m’accroupir.
Heureusement Aleksej vint à mon secours et me prit le bras.
“Tu as peut-être perdu la mémoire mais pas ta passion pour lesdiamants, en tout cas”, s’écria Aleksej d’une voix tranchante,saisissant la bague pour me la tendre.
Prenant la bague de ses mains je demandai : “S’agit-il de vraisdiamants ?” Je fis ce geste sans le toucher car j’avais récemmentremarqué à quel point il gardait ses distances.
“Oui.”
Je la tournai entre mes doigts.
Elle était splendide et brillait d’un vif éclat. Elle semblaitextrêmement précieuse.
C’était une bague exceptionnelle, la plus belle qu’il m’aitjamais été donné de voir.
Cette phrase me traversa l’esprit.
Émue et troublée par ce souvenir, je regardai Aleksej.
Il était assis à côté de moi et sa jambe droite frôlait lamienne.
Il y avait quelque chose d’intime dans ce contact.
Je parcourus son corps du regard, jusqu’au visage.
Et je vis.
Nous n’étions plus dans une chambre d’hôpital mais dans unbureau luxueux, aux meubles d’acajou.
Mes jambes n’étaient plus à côté de celles d’Aleksej mais poséessur les siennes.
J’étais assise sur ses genoux.
Je pouvais entendre ma voix au loin, prononcer des paroles commeproposition et mariage.
Oui, je le veux, Aleksej. Je t’épouserai.
Je sursautai, éperdue, et le flash-back s’interrompit instantanément.
Je retrouvai devant moi l’homme de mes souvenirs.
“Tout va bien ?”, demanda-t-il à l’improviste d’un ton sérieux,comme s’il comprenait ce dont je me souvenais.
J’acquiesçai hésitante.
Je comprenais à présent les raisons de sa haine, mais pas aupoint de m’abandonner seule et sans assistance.
Comment aurait-il pu accepter d’avoir épousé une criminelle?
Combien de mensonges lui avais-je racontés ?
“Tu ne m’as pas dit que nous étions mariés », parvins-je àarticuler malgré l’embarras.
Contrarié, il réagit : “Pardon ?!”, s’éloignant brusquement.
“Avons-nous des enfants également ?”
“De quoi diable parles-tu ?”
“J’ai eu un flash-back où nous étions tous les deux : tu m’as donnécette bague et je crois que tu m’as fait une demande en mariage.Tout était un peu confus mais je me rappelle clairement t’avoir ditque j’en avais envie et que je t’épouserais.”
Passant la main dans ses cheveux avec fébrilité, au point dedéfaire sa coupe toujours parfaite, il m’interrompit. “Nous nesommes pas mariés.”
Cela m’inquiéta davantage : “Donc j’ai été victime d’unehallucination”.
“Non, tu te rappelles bien, plus ou moins.”
“Et donc ?”
Aleksej me fixa intensément, d’une expression indéfinissable quifit battre mon cœur avec intensité.
“Oui, nous devions nous marier, mais avec l’accident il a fallutout ajourner”, me répondit-il prudemment.
“Pourquoi ne pas me l’avoir dit plus tôt ? As-tu honte de moi dufait que je suis une voleuse ?”
Aleksej ne répondit point mais il continua à me dévisager d’unair incrédule.
“Tu m’as dit que je t’ai trahi. Cela signifie que j’ai couchéavec quelqu’un d’autre, n’est-ce-pas ? C’est bien ce que tu voulaisme dire ? Ou bien est-ce parce que je t’avais dissimulé mon passéde délinquante ?”, poursuivis-je sans broncher, décidée à obtenirdes réponses.
“Je dois m’en aller”, répondit-il sèchement, après un longsilence qui m’épuisa.
Je le suppliai : “Non, attends ! Aleksej !”, en vain car ilétait déjà parti.
Le lendemain je ne le revis pas et j’eus le pressentiment del’avoir perdu pour toujours.
L’univers entier s’effondrait sur moi et je ne savais pascomment l’empêcher.

5

ALEKSEJ
J’avais commencé ce petit jeu pervers, entremêlant vérité etmensonge, uniquement pour démasquer Kendra et son amnésieabsurde.

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Tu Es À Moi Victory Storm

Victory Storm

Тип: электронная книга

Жанр: Шпионские детективы

Язык: на французском языке

Издательство: TEKTIME S.R.L.S. UNIPERSONALE

Дата публикации: 16.04.2024

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О книге: Quand Kendra prit la décision d′approcher Aleksej par la ruse, elle était consciente des risques qu′elle prenait car cet homme était sans pitié et ne pardonnait jamais, et par ailleurs suffisamment puissant pour lui faire chèrement payer toute erreur de sa part. Un seul faux pas et elle perdait la possibilité d′obtenir les informations qu′elle recherchait. Plusieurs mois se sont écoulés depuis leur première rencontre lorsqu′à l′improviste tout bascule à la suite d′une trahison qui met la vie de Kendra en danger et révèle tous ses mensonges. Le moment du règlement de compte est arrivé et Aleksej est prêt à la détruire. Mais, au moment où il la tient entre ses mains, il découvre qu′elle a oublié son passé, un passé qui cache des secrets qu′il a besoin de connaître. Il va devoir choisir entre sa vengeance ou garder cette femme dangereuse à ses côtés, serrée entre ses spires, jusqu′au jour où elle recouvrera la mémoire.

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